Ce jour-là, Elle allait avoir treize ans. elle était partie voler avec Maghnar. Son père, sa mère et son jeune frère l’y avaient exhorté. Ses amis et ses voisins les plus proches étaient venus les visiter. Pendra avait sillonné le ciel et réalisé avec le dragon quelques surprenantes figures aériennes. Elle avait hâte de raconter sa dernière prouesse à sa famille…
…Une épaisse fumée noire s’élevait des ruines incandescentes de la chaumière qui depuis près de deux cents ans appartenait à sa famille. Des corps sans vie jonchaient le sol, baignant dans leur sang ou à moitiés calcinés. La petite fille regardait la scène sans même verser une larme. Son père, sa mère, son frère, ses amis gisaient parmis les cadavres d’inconnus responsables du carnage. Les yeux de sa mère, grands ouverts, la regardaient avec toute l’horreur de ses derniers instants…

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Elle se réveilla en sursaut, le visage ruisselant de sueur. Elle toucha machinalement son épaule mais elle ne ressentit aucune douleur. Pourtant, en regardant sa main, elle la vit rouge de sang. Elle se trouvait dans un jardin qui irradiait la paix et embaumait le parfum des roses. Elle sut alors que, soit elle était parvenue à destination, soit elle était morte. Mais elle ne voulait pas mourir. Ce rêve lui avait retourné le couteau dans la plaie et ravivé sa raison de vivre. Elle interrompit brutalement sa réflexion quand elle se rendit compte qu’on l’observait. Une jeune femme vêtue d’une simple robe blanche se tenait debout, arborant un sourire qui lui donnait un air stupide. Elle souhaita la bienvenue à Pendra alors que celle-ci se relevait. Sans passer par quatre chemins, la guerrière questionna l’inconnue sur le Collier Dragon. Elle répondit avec un sourire béat en affirmant qu’elle savait où se trouvait l’objet de sa convoitise puis elle lui proposa de la suivre jusqu’à lui. Pendra ne se le fit pas dire deux fois.
L’artefact était posé sur un socle de marbre à l’abri d’un kiosque en bois et éclairé par une lumière irréelle. Il n’était pas aussi énorme qu’elle l’avait imaginé. C’était en fait un assemblage de morceaux d’ambre parsemé de rubis et de saphirs duquel émanait une puissance sourde, comme un bourdonnement. La jeune étrangère interrompit encore une fois les pensées de l’intruse.
« Il était temps que quelqu’un d’autre se charge de sa garde. Je commençais à me lasser de ce paradis. Et puis, quelques siècles de repos me suffisent. »
Un doute affreux s’immisça en Pendra.
« Comment ça ? Quelqu’un d’autre, questionna-t-elle, suspicieuse ?
- Hé bien, le Conseil Dragon m’avait promis une remplaçante pour la garde du Collier. Ils viendront bientôt me chercher. Il n’y a qu’eux qui puissent rentrer ou sortir du demi-monde…les dragons je veux dire. »
La vérité frappa Pendra de plein fouet. La quête de cet artefact n’était qu’un piège ! Un piège pour la mettre hors du jeu et s’emparer de Maghnar. Depuis le début le Conseil avait su qu’un jour ou l’autre le serment serait rompu, ce qui était logique en soi. Il avait prévu cette histoire de Collier dès le départ, la présence de cette jeune fille l’attestait. Ses ancêtres et, plus grave encore, elle-même avaient été dupés. Une vague de rage déferla en elle et elle fonça sur l’artefact en écartant le bras de l’étrangère qui tentait de la retenir, le regard affolé. Pendra posa la main sur l’objet et, à ce moment, une décharge de douleur la vrilla jusqu’à l’âme. Le Collier était entouré par un sort de protection ! Elle ne parvenait plus à bouger ne serait-ce que le petit doigt et voyait la mort s’approcher inexorablement. Dans un dernier effort, elle hurla le nom de Maghnar avec un soubresaut d’espoir déraisonné. Le paysage se brouilla, le sol perdait de sa consistance et elle sombra dans une mer de néant.
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