Elle se cache, elle attend
Sous terre, elle compte le temps
Qui s'écoule. Elle redoute le jour
Où elle, fruit d'un amour,
Connaîtra le même sort que ses parents
Et que chaque génération les précédent.
Le moment est venu, la neige fond :
Timidement, elle sort de son cocon,
Elle observe l'horizon: personne, rien,
Juste un renard et deux ou trois lapins.
Elle s'étire, se pavane au soleil,
Jamais elle n'aurait cru la Terre, une telle merveille,
Si bonne, si fraîche, si vivante.
Elle vit, elle dort, et dans le vent chante.
Le soleil la ravive et la pluie la rafraîchit :
Jamais elle n'a connu un tel paradis.
Mais un jour radieux, un jour comme les autres,
Elle les entend venir la chercher et quelques autres.
Par le vent elle écoute ses soeurs, hurlant :
"Le massacre a commencé plus tôt que l'an d'avant! "
Ils arrivent à sa hauteur en écrasant toutes ces vies,
Jamais elle n'avait vu pareil agonie :
Des centaines d'êtres applatis, recourbés,
Ou de la terre aimée brutalement arrachés.
Les géants se penchent,ils l'attrapent, ils l'aggripent,
Et l'arrachent brutalement, car ce n'est qu'une tulipe. |