Nibelheim. Magnifique petite ville nichée au pied des montagnes. Baignée par le soleil de fin d’après-midi, cette petite cité est calme et paisible. Deux enfants jouent encore à la balle près de la vieille citerne trônant au milieu de la place principale en riant aux éclats.
Un chien errant les regarde s’amuser en reniflant une odeur plaisante. Une brise fraîche lui ébouriffa le poil et le fit éternuer. Une porte s’ouvrit et une mère de famille appela ses progénitures pour venir dîner.
La nuit n’allait pas tarder à assombrir le ciel clair, remplaçant les nuages blanchâtres par de scintillantes étoiles.
Peu à peu les dernière lumières s’éteignirent plongeant le petit hameau dans le crépuscule. Derrière les habitations, un vieux château délabré dominait le village de sa hauteur.
Inhabité depuis bien longtemps, personne ne l’approchait plus car il était réputé pour être hanté. Personne ? Rien n’est moins sûr ! Seuls ceux qui connaissent les innombrables passages secrets que recèle cette vieille bâtisse y pénètre dans la plus grande discrétion.
Un escalier dérobé, dissimulé par un mur coulissant dans une cheminée, descendait dans les entrailles de la terre et débouchait sur un chemin mal éclairé.
D’anciennes portes en bois renfermaient de lourds secrets que nul homme ne connaissait.
Tout au bout de ce dédale, une faible lueur subsistait, refusant d’être engloutie par les ténèbres.
Derrière cette porte était enfermé quelque chose qui allait se révéler dangereux pour l’avenir. Qu’y a-t-il derrière ?
Et bien… ouvrez-la si vous l’osez. C’est derrière que commence l’histoire…
Le Commencement
Des cris de souffrance résonnaient sous terre déchirant le silence de la nuit.
Là, enchaîné sur une table en métal, se trouvait le corps d’un jeune homme qui devait avoir à peine vingt ans. Les traits fins lui conféraient un air d’ange encadré par de beaux cheveux blonds. Son regard azur était fixé sur le plafond de la pièce, les pupilles dilatées. Un filet de sang coulait de sa bouche, venant lécher la douce courbe de son cou.
Les muscles de ses bras étaient contractés et les veines saillaient à plusieurs endroits. Des liens de cuir durement serrés lui entravaient les poignets et lui coupaient la circulation sanguine. Sur son torse dénudé perlaient quelques gouttes de sang dont l’éclat pourpre contrastait violemment avec la pâleur de sa peau.
Des échimauses bleuissaient son corps meurtris mais rien n’était pire que la vue de l’abdomen du jeune homme ouvert dans toute sa longueur mettant à nu les organes vitaux.
Une marre de sang dégoulinait de la table et les gouttelettes venaient rougir le sol, s’écrasant dans un « ploc » répétitif.
Un homme âgé d’une quarantaine d’années, les cheveux de geai attachés en queue de cheval et deux mèches tombant sur le visage se tenait au-dessus du jeune homme. Sa blouse blanche maculée de sang et un scalpel souillé à la main, il regardait le corps inanimé du garçon blond par-dessus ses lunettes ovales. Un rictus de dégoût s’afficha sur son visage et il laissa délibérément tomber son instrument de chirurgien dans l’abdomen de son patient.
« Encore un qui n’a pas survécu à mon génie, fit-il d’une voix empreinte de lassitude et de frustration, passons à une autre expérience ! »
Laissant le cadavre du garçon blond refroidir sur la table de tortures, il se dirigea vers un pan de mur de son laboratoire où étaient disposées plusieurs cuves. Un liquide dans les tons vert quasiment translucide d’où s’échappaient quelques bulles, remplissait toutes ces cuves. Deux d’entre elles étaient occupées par des corps humains. D’innombrables tubes et câbles entremêlés y étaient reliés, alimentant les cylindres en énergie.
L’homme s’approcha et contempla ses expériences un sourire sadique aux lèvres. L’une était une jeune femme aux longs cheveux châtains flottant dans le liquide servant à conserver le corps intact, l’autre possédait des cheveux plus courts dont les mèches ondulaient au rythme du moteur des cuves. Les deux corps étaient recroquevillés en position fœtale, des masques englobant leurs nez et leurs bouches lui conféraient de quoi s’oxygéner.
D’autres fils parcouraient leurs corps et certaines parties de leurs membres brillaient d’une étrange lueur bleutée. Leurs visages paisiblement endormis laissaient penser qu’elles étaient au pays des rêves, il était quasiment impossible de définir leur âge même si en apparence elles ne devaient pas avoir plus d’une vingtaine d’années.
« Hinhinhin et bien mes jolies, j’espère que vous serez moins décevantes que mon dernier jouet ! ricana le savant en tapant sur la paroi de verre des cuves.
Georges !! appela-t-il, fait-moi sortir ces deux créatures de leur conserve que je m’amuse un peu avec elles… »
Son assistant, un jeune homme d’allure chétive aux courts cheveux bruns et aux yeux couleur noisette s’exécuta. Il coupa l’alimentation des cuves et enclencha l’évacuation du liquide.
« Hinhinhin je sens que je vais bien m’amuser avec vous ! » se délecta le savant en se frottant les mains tout en jubilant d’avance.
Soudain les deux jeunes filles ouvrirent les yeux en même temps révélant leurs pupilles de glace pour l’une et rouge sang pour l’autre. Une vague d’énergie se dégagea de leurs corps, brisant les cuves qui les retenaient prisonnières.
« Mais…. Que se passe-t-il ?! »
Elles commencèrent à se redresser, arrachant les nombreux fils les entravant. Les éprouvettes et autres ustensiles en verre volèrent en éclat sous l’effet de la pression de l’air, livres et manuscrits traversaient la pièce en tournoyant comme pris dans une horrible tempête. Les néons qui éclairaient la pièce se brisèrent eux aussi, plongeant le laboratoire dans une nuit où les éclairs fusaient et où deux corps auréolés de bleu dégageaient une lumière électectrisante.
« Enclenche le processus de cryogénisation !! » hurla le scientifique à son assistant en luttant contre la vague d’énergie déferlant sur lui et tout ce qui l’entourait.
Le pauvre jeune homme peina à atteindre le poste de commande et put appuyer sur un bouton rouge avant de se faire écraser par le matériel électrique des cuves. Un vent glacé repoussa les deux assaillantes qui, dénudées, ne purent résister à la basse température. Elles se figèrent l’une les bras écartés, le buste et la tête légèrement penchés en avant comme si elle avait été pendue par les mains, et l’autre les bras en croix sur la poitrine telle une ancienne reine momifiée. Leurs yeux se fermèrent emprisonnant dans la glace leurs pouvoirs dévastateurs.
Le calme revint sur un champ de ruines où toutes les installations avaient été ravagées et détruites. Le savant se releva avec peine en époussetant sa blouse couverte de poussière et de gravats.
« Hinhinhin et bien. Quelle énergie mes chéries, vous avez presque failli échapper à mon contrôle encore une fois ! Oh oh vous avez tué mon nouvel assistant ! C’est fâcheux, il va falloir que je trouve un autre débile pour financer mes recherches. » constata-t-il en voyant un bras dépasser de sous un générateur baignant dans une marre de sang.
Il regarda les dégâts occasionnés dans la pièce tout autour de lui : la quasi-totalité de la verrerie n’était plus utilisable, le matériel électrique était gravement endommagé, les documents éparpillés aux quatre vents… Un pan de mur en briques entre les deux bibliothèques de la pièce mitoyenne au laboratoire s’était effondré à cause de l’importante vague d’énergie qu’avaient généré les deux filles. Son regard emplit de noirceur se porta de nouveau sur ses deux cobayes.
« Elles sont beaucoup trop puissantes pour être contrôlées. Quel gâchis ! De si beaux jouets, je vais devoir les détruire…… Non, pas les détruire ! réfléchissait-il tout haut en faisant les cent pas dans la pièce ; Je vais devoir vous séparer mes petits anges destructeurs comme ça vous ne pourrez plus combiner vos pouvoir pour me nuire hinhinhin. Oui c’est ça ! C’est brillant, hinhinhin je suis vraiment un génie ! »
Il parti d’un grand éclat de rire les yeux exorbités tel un fou, son plan était parfait : il en garderait une ici, à Nibelheim, et cacherait l’autre dans un endroit que personne à part lui connaîtrait. Cryogénisées, elles ne subiraient pas les altérations du temps et leurs pouvoirs resteraient intacts jusqu’à ce qu’il se décide à les réutiliser si l’envie l’en prenait. Il sorti de la poche de sa blouse un téléphone et composa un numéro et attendit d’avoir son correspondant qui décrocha enfin :
« Allo ? » fit une voix masculine à l’autre bout.
« Oui Georges c’est moi, je vais avoir besoin de tes services. Je fais de toi mon nouvel assistant ! » lui dit le savant sans guère plus d’explications.
« Ah professeur Hojo, je ne m’appelle pas Georges vous savez. Mais je suis ravi que vous me preniez comme apprenti…….. euh mais pourquoi maintenant au fait ? » s’enquit l’homme mystérieux.
« Et bien…. Disons que ton prédécesseur nous a quittés plus tôt que prévu... Bien, viens tout de suite au manoir de Nibelheim ton nouveau travail commence dès maintenant ! »
« Bien professeur ! J’arrive tout de suite !! » déclara-t-il une pointe d’excitation dans la voix avant de raccrocher.
« Hinhinhin, encore un jeune imbécile qui croit que je vais lui livrer mes secrets. Enfin bon, je m’en débarrasserais le temps venu, comme pour les autres. »
Peu de temps après, un jeune homme déboula dans le laboratoire en courant. Il ouvrit la porte à la volée et s’appuya conte l’encadrement de celle-ci pour reprendre un peu son souffle. Sa blouse était ouverte, sa manche gauche tombant au niveau du coude ; sous sa blouse il portait un T-shirt noir et un pantalon de la même couleur. Ses longs cheveux châtains tirant sur le roux étaient complètement décoiffés et pendaient en mèches hirsutes et entremêlées encadrant un visage fin. Ses joues étaient rouges à cause d’avoir couru comme un forcené et il avait du mal à reprendre sa respiration. Il possédait des yeux noir ébène brillant de malice et avides de connaissance.
Quand il eut réussi à reprendre son souffle, il articula :
« Pfiou qu’est-ce qu’il s’est passé ici ?! »
« Petit problème expérimental, répondit simplement Hojo en ajustant ses lunettes, viens ici. Tu vas m’aider à déplacer des deux là avec la plus grande précaution et délicatesse ! »
Le jeune homme s’avança vers les blocs de glace que désignait le savant en remettant de l’ordre dans ses cheveux et ses vêtements.
« Oh, elles sont magnifiques ! A quoi vont-elles servir ? »
« Nous allons les enfermer quelque part séparées l’une de l’autre. » répondit Hojo en lui faisant signe de s’approcher.
Le nouvel assistant regarda son maitre avec un regard surpris.
« Les enfermer ? Mais…. Pourquoi ?! »
« Ce ne sont que des expériences ratées qui sont incontrôlables pour le moment. »
« Elles sont si dangereuses qu’il faille les cacher séparément ? »
« Je trouve que tu poses beaucoup trop de questions à mon goût, tu vas m’obliger à me séparer de toi plus tôt que prévu… »
« Mais je… »
« Silence ! Encore un mot et je t’envoie rejoindre ton prédécesseur ! » cria-t-il les yeux exorbités en désignant son ancien assistant.
Le pauvre jeune homme avala sa salive et acquiesça d’un mouvement de tête, signe que le message était bien enregistré. Il s’avança et commença à connecter des câbles à des générateurs puis à les relier aux corps des jeunes femmes en passant délicatement à travers la glace.
Les deux expériences allaient donc être séparées à cause de leur trop grande puissance destructrice. Les deux savants cachèrent les corps dans deux lieux éloignés l’un de l’autre et dans deux endroits que personne ne pourrait trouver… |